Une nuit, tous les rossignols se mirent
à chanter et leurs merveilleux trilles allèrent si loin qu’une jeune fille
prénommée Cerise les entendit.
Elle vivait en recluse dans un somptueux
pavillon où abondaient des objets précieux. Il y avait des paravents, des
éventails, des tables en bois précieux, des tapis d’Orient, des fauteuils
capitonnés de velours, des sofas, un lit à baldaquin et surtout une gigantesque
cuisine où s’affairaient des brigades talentueuses formées par la mère des
compagnons du Val des Cygnes. Cerise avait appris l’histoire de son destin de
cette femme admirable dont les lèvres semblaient faites pour goûter les
produits cuisinés. On avait trouvé Cerise dans un berceau d’églantines. Le bébé
était somptueusement vêtu et était protégé par un flot de dentelles et de
soieries, bien calé dans un berceau d’osier entrelacé de roses.
Un simple mot : je me nomme Cerise.
On avait apporté ce trésor à la propriétaire du pavillon, une femme mi- ange,
mi- fée et cette femme lui avait inculqué tout son savoir avant de partir vers
un autre monde, plus bleu, plus intense où les poèmes s’incarnaient. Cerise
vécut alors dans l’attente d’un fait exceptionnel qui la rendrait au monde
lumineux qui l’attendait. Et cela arriva, grâce au chant des rossignols.
Décidée à conquérir une raison de vivre, Cerise se vêtit de laine, se chaussa
de bottines fourrées et suivit la route du chant céleste.
Après plusieurs jours de marche, ses
provisions étant épuisées, elle pénétra dans un bois et se nourrit des fruits
de la nature. Elle demanda le gîte et le couvert en découvrant enfin une maison
de briques roses incrustées de pierres précieuses qui flamboyaient au soleil.
L’hôtesse des lieux semblait une divinité tant sa beauté était hors du temps.
Des fleurs ornaient ses cheveux et tous ses mouvements étaient gracieux et
empreints de poésie.
On servit à Cerise un excellent repas,
une tourte aux champignons, des rouelles de veau à la crème et un Saint Honoré
magistral.
Puis Cerise fut conduite dans ses
appartements spacieux et dotés d’un superbe mobilier.
Une dame d’atour l’aida à préparer sa
toilette de nuit et elle revêtit une somptueuse chemise si ouvragée qu’elle
semblait être une œuvre d’art.
Elle s’endormit et ne vit pas un
rossignol s’introduire dans la chambre et se poser délicatement sur l’oreiller,
près de ses boucles.
Le lendemain, on lui présenta un
visiteur, le prince Nightingale. Il s’agissait naturellement du roi des
rossignols et il était venu du bout du monde pour trouver sa princesse, Cerise
la bien nommée car ses lèvres en forme de cœur attendaient ses baisers.