dimanche 23 mars 2014

Lancelot





Lancelot, le chevalier blanc aux éclats d’argent parcourt le monde à la recherche de son amour perdu, la belle Guenièvre dont il a oublié le nom. De son corps, il ne lui reste qu’une traîne de nuages. Son visage a disparu dans les replis de sa mémoire.
De ses cheveux, seuls les rayons du soleil lui renvoient le souvenir flamboyant d’une caresse de soie.
Ses beaux yeux, il les retrouve dans les eaux limpides des lacs et le grand ciel bleu.
D’un amour éperdu ne subsistent que quelques bribes et des mots balbutiés les soirs de folie.
Par contre, il lui reste au cœur une immense douleur, celle d’avoir trahi son Roi et d’avoir négligé la précieuse quête du Saint Graal.
Il ne rencontre sur son chemin que solitude et désespoir. Les terres démembrées et les silhouettes hagardes de ceux qui ont mis toute leur confiance dans les preux chevaliers de la Table Ronde lui rappellent à chaque instant la trahison et la dispersion des meilleurs défenseurs du peuple. Ils ont tous failli à leur tâche, à l’exception de Perceval qui vit le calice sacré mais ne sut pas ce qu’il convenait de faire pour sauver le royaume. La nuit enveloppe Lancelot mais il ignore le repos, prêt à mourir sur son cheval d’épuisement faute d’avoir rempli son devoir au moment où l’on avait besoin de son épée. Il lutte contre lui-même, n’ayant jamais trouvé d’adversaire à sa taille.
Enfin, dans un halo de lune, elle lui apparaît, la terre promise, celle où se pressent des habitants heureux. Elle a l’apparence, de Guenièvre, sa belle, son aimée. Il la retrouve dans ses vêtements d’apparat. Il veut la serrer contre son cœur et ce geste ultime le conduit à la mort, la seule victoire de sa vie !

vendredi 21 mars 2014

Le Prince Vénitien





Au cœur d’un groseillier du Japon, l’âme d’un prince vénitien était à la recherche d’une parure. Un rayon de soleil lui donna un visage, une mésange lui offrit la pureté de son regard et un flamant rose servit de corset fuselé à un jeune homme dont la taille élancée attirerait les regards des jeunes filles, ce qui se produisit dès qu’il se mit en marche avec une grâce inégalée.
Notre prince prit tout naturellement la direction d’une rivière dont le cours le conduirait inévitablement à Venise en plein carnaval où il avait naturellement sa place.
De gabarre en felouque, il accosta enfin dans la ville de Marco Polo, rêvant d’une Chine où l’amour occuperait tous les esprits. Il se fondit dans la foule, changea plusieurs fois de masque et c’est lors de sa dernière métamorphose, mozartienne et Don Juanesque qu’il croisa le regard de l’élue de son cœur, une jeune femme aux yeux noirs et au sourire d’enfant. Il lui baisa la main et tous deux marchèrent au hasard des rues et des flots à bord d’une gondole.
Un envol de pigeons leur apprit que le voyage était terminé.
Les deux amants choisirent un cortège conduit par un beau masque, celui du prince de Venise, du moins par l’esprit, le grand Marco Polo lui-même.
Des noces furent improvisées au sein de la ville et les notes du Mariage de Figaro s’égrenèrent tandis que les chanteurs donnaient de la voix.
La mariée porta une jolie couronne de fleurs tressées dont la couleur pourpre dominait, tranchant sur l’ivoire de la robe de mariée d’une remarquable finesse, en soie, satin et dentelles.
Le prince était si beau qu’il n’avait pas besoin d’un autre costume que le sien, venu des origines, un berceau de groseillier du Japon en fleurs !